Dans cette fiction théâtrale poétique et tempétueuse, une épatante comédienne « emménage » dans le corps et l’esprit de Lucia Joyce, danseuse schizophrène dont le personnage se confond étrangement avec celui d’un livre écrit par son père, James Joyce.
Fille de l’un des écrivains les plus influents du XXème siècle, Lucia fut placée une grande partie de sa vie en institution où elle mourut. L’a-t-on faite passer pour folle ? L’a-t-on rendue folle ? L’auteur Eugène Durif a mené l’enquête. Selon lui, pour le savoir, il faut lui redonner la parole, tour de force à la portée de la fiction et du théâtre. Sans bride et sans pudeur, révoltée, extraordinaire, la performeuse Karelle Prugnaud (également metteuse en scène cette saison de Mister Tambourine Man, écrit par Durif) qui a commencé comme acrobate de rue aborde avec maestria la figure de cette femme aux plusieurs visages, seule sur scène. Il y a les grimaces, les cris de folie et de joie, la voltige de ce corps qui n’a plus de frontière, ni dans le temps, ni dans l’esprit, ni sur les planches. Soufflant sur les braises d’un feu qui grossit jusqu’à lécher tous les rangs de la salle, cette Lucia Joyce déploie toute sa force pour libérer un théâtre qui, lui aussi, veut s’affranchir de sa camisole.
